TOUT FEU TOUS FLAMME
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Et que je te brandisse la flamme olympique par ci, et que je te trimballe la flamme olympique par là, et que je te l’exhibe par ici et que je te la coltine par là… Je ne pensais pas avoir un jour une telle saturation d’olympisme, qui plus est à deux mois de l’ouverture des jeux, mais là, franchement, je n’en peux plus. Je sature déjà. Cette entreprise d’enfumage généralisé commence par m’échauffer le cervelet à un point tel que cela a presque éteint en moi toute envie d’assister à cette grand-messe du sport mondial, en live dans la capitale ou en différé devant mon téléviseur.
Certains rétorqueront que ma réaction est excessive. Ils feront remarquer que résider dans le pays organisateur est une chance énorme pour qui aime le sport. Ils ajouteront qu’un tel événement ne se produit que tous les quatre ans, que la France n’en a accueilli que deux éditions jusqu’à présent (1900 et 1924) et que la précédente remonte à un siècle. Bref, ils trouveront toutes les raisons de s’enflammer pour cette 33ème olympiade des temps modernes, en se gardant bien de préciser que toutes les précédentes villes organisatrices se sont retrouvées déficitaires, tant sur le plan financier que sur le plan social, en raison de l’explosion des budgets prévisionnels et de la férocité des aménagements urbains, invariablement exécutés au détriment des plus pauvres. Ils oublieront également d’évoquer le prix des billets pour assister aux épreuves de 2024. Officiellement, il oscille entre 24 et 950 euros, à condition d’avoir été tiré au sort et de ne pas être trop regardant sur les disciplines proposées. Un an avant, une quinzaine de sports n’étaient déjà plus accessible au grand public. Quant à la cérémonie d’ouverture sur la Seine, entre des sites aussi prestigieux que les jardins du Trocadéro et la Tour Eiffel, la seule baisse qui a été enregistrée est celle de l’affluence du public. Initialement annoncée à 600.000 personnes, à grand renfort d’effets médiatiques et de gesticulations politiques, la jauge a d’abord été réduite à 400.000, puis à 300.000 spectateurs. Évidemment, les quidams seront parqués à distance, sur les quais hauts, aussi à l’aise que des cachalots dans une boîte de sardines, tandis que le gratin aura accès aux tribunes les mieux placées, à raison de 2700 euros la place. Une belle flambée des prix.
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Mais revenons à nos moutons de la mer Égée et à la fameuse flamme olympique. Les historiens situent les premiers Jeux olympiques aux alentours de l’an 800 avant Jésus-Christ, mais il existait des centaines de réunions du même type, appelées agônes, qui entremêlaient souvent domaines sportifs et artistiques. Les Jeux pythiques, les Jeux néméens, les Jeux isthmiques… il n’y avait que l’embarras du choix, un choix que les Romains reprirent plus tard à leur compte, avec les dérives que l’on connaît. Les Jeux olympiques entrèrent dans l’histoire moderne et volèrent la vedette à tous les autres par la grâce d’un historien et pédagogue français. Pierre de Coubertin (1863-1937) en fut le grand rénovateur et promoteur en 1894, fondant la même année le CIO (Comité International Olympique). Durant les 30 premières éditions de ce qu’il est convenu d’appeler les Jeux Olympiques modernes, il n’y eut pourtant aucune vasque flamboyante ni retour de flamme spécifique. De même, vingt-deux siècles plus tôt, pas le moindre relai de flamme olympique ne venait troubler les paysages helléniques. Au sanctuaire d’Olympie, qui accueillait les Jeux antiques, il y avait bien une flamme qui brûlait sur l’autel de l’Héraion, temple d’Héra, mais, à l’instar du feu sacré présent dans tous les sanctuaires grecs, elle était entretenue en permanence. Il n’y avait pas d’allumage spécial pour les Jeux olympiques, et encore moins de pérégrination tapageuse en son nom. En réalité, l’embrasement de la vasque du stade olympique remonte aux JO d’Amsterdam, en 1928, et le parcours suffisant de la torche, huit ans plus tard, est une pure invention de Carl Diem, un universitaire allemand au comportement douteux durant la seconde guerre mondiale. Nommé organisateur des JO de Berlin, en 1936, il proposa cette idée lumineuse, qui enthousiasma Hitler et Goebbels, ceux-ci y voyant un formidable vecteur de propagande à la gloire du Troisième Reich. Par la suite, il avait d’ailleurs été fortement question d’abandonner ce prologue pyrotechnique… mais le relai a depuis été solidement assuré par le sens des affaires des organisateurs et les visées électoralistes des politiques. En ce printemps 2024, le brandon magnifique exalte bien des vanités. Pour son passage dans chaque département français, le CIO exige la modique somme 180.000 euros TTC. Les villes doivent souvent y ajouter des milliers d’euros supplémentaires (sécurité, aménagement des lieux, locations diverses, logistique et organisation d’événements annexes…) pour attiser ce cirque itinérant, avec le risque d’échauffer certains esprits et d’embraser certaines rancœurs. L’été n’a pas fini d’être chaud.
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Tout a fait d accord… peu intéressant de savoir ou est la flamme !