GENEVIÈVE DE FONTENAY

LORRAINE D’ORIGINE

La nouvelle de son décès, survenu le mardi 1er août à Saint-Cloud, dans les Hauts-de-Seine, ne suscita pas une émotion particulière chez moi, Geneviève de Fontenay n’ayant jamais fait pas partie des personnalités que j’admirais. Ses prises de position, notamment contre l’homoparentalité, la procréation médicalement assistée pour les lesbiennes et l’acceptation des personnes transgenres dans les concours de beauté, en étaient probablement les raisons principales. Et puis, une de mes copines, fan de l’élection Miss France, m’a téléphoné : « Alors ? Tu n’es pas un peu triste pour Geneviève de Fontenay ? Je sais que son concours n’était pas ta tasse de thé, mais c’était une Lorraine, comme toi. ». Une Lorraine, Geneviève de Fontenay ? Par Saint Nicolas et Jeanne d’Arc réunis, comment était-ce possible ?

Une recherche rapide sur internet me confirma l’information. Madame de Fontenay, alias Geneviève Suzanne Marie Thérèse Mulmann pour l’état civil, était née le 30 août 1932 à Longwy, en Meurthe-et-Moselle. Aînée d’une fratrie de dix enfants, avec un père ingénieur des mines dans les aciéries de Hagondange, en Moselle, elle fut scolarisée chez les religieuses de la Miséricorde à Metz, avant d’entrer à l’école hôtelière de Strasbourg, puis d’émigrer à Paris pour entamer une formation d’esthéticienne. Elle y rencontra Louis Poirot, qui fut l’homme de sa vie de 1954 à 1981. Avant et après guerre, il eût maille à partir avec la justice française pour des affaires d’escroquerie et de faux. Se présentant comme ancien résistant, ce journaliste-publiciste utilisait alors le pseudonyme “de Fontenay”. Il était également délégué général du comité Miss France, que Geneviève intégra en 1954, au poste de secrétaire générale. Mannequin chez Balenciaga, elle fut élue Miss Élégance en 1957, puis devint l’assistante de Louis Poirot de Fontenay en 1962. À la mort de ce dernier, en 1981, elle reprit les rênes du comité Miss France, qu’elle transforma alors en société.

Si l’on trouve peu de documents photographiques se rapportant à sa carrière de mannequin et de miss, l’iconographie concernant l’ex-présidente de Miss France regorge de clichés nombreux et variés, avec une constante emblématique : le chapeau. Durant quatre décennies, Geneviève de Fontenay imposa son personnage médiatique à grands coups de tailleurs et de galurins bon chic bon genre. Une constance qu’elle eut du mal à transposer dans ses engagements politiques. En 2002, elle soutint la candidature à l’élection présidentielle d’Arlette Laguiller, porte-parole de Lutte ouvrière, puis celle de Ségolène Royale en 2007, celle de François Hollande en 2012, et celle d’Emmanuel Macron en 2017. Un an plus tard, dans une campagne anti-Macron, elle se rangea du côté de Florian Philippot (qui venait de quitter le Front National pour créer le parti des Patriotes) tout en précisant qu’elle avait toujours voté à gauche, sauf pour Chirac contre Jean-Marie Le Pen.

Grande ordonnatrice de l’élection Miss France, elle acquit une popularité grandissante avec le succès de l’événement. Mais ce succès attisa les convoitises. Longtemps, elle tint la barre avec fermeté, attachée à des valeurs traditionnelles. Dans les années 2000, la publication de photos dénudées de plusieurs Miss France, que Geneviève voulut destituer, fit enfler la polémique. Idem pour ses déclarations contre l’éventuelle candidature de femmes transgenres au titre national, qu’elle jugeait « contre nature », « déshonorante » et « salissante pour le titre de Miss France ». Profitant de la situation, certains proches portèrent alors l’estocade. En 2010, la société de production télévisuelle Endémol, tristement célèbre pour ses programmes de téléréalité, fit main basse sur le filon Miss France. Xavier de Fontenay, le fils et associé de Geneviève, aurait cédé l’affaire pour 600.000 euros. Sylvie Tellier, Miss France 2002, dont les dents rayaient depuis longtemps le parquet de l’appartement du dessous, ne se fit pas prier pour prendre aussitôt le fauteuil de celle qui lui avait tout appris. Durant les années suivantes, Geneviève de Fontenay tenta de refaire surface avec un comité dissident, d’abord intitulé Miss Nationale, puis Miss Prestige National, mais les recours en justice et les trahisons des faux amis eurent raison de sa passion. En 2016, elle annonça son retrait des concours de beauté. Vivant modestement dans un appartement de type HLM à Saint-Cloud, avec une retraite d’environ 1200 euros par mois, elle disait ne plus vraiment aimer la société actuelle. La rencontre avec son public ne se faisait plus qu’à l’occasion de dédicaces dans des foires, des supermarchés ou des salons de mariage. Elle disait souvent : « Miss France c’est ma famille, mon histoire, ma vie. ». Tous ceux et celles qui répandent aujourd’hui des larmes de crocodiles et des hommages ruisselant d’hypocrisie, en lui arrachant l’une, ont peut-être écourté l’autre. À l’approche de ses 91 ans, la dame au chapeau a définitivement tiré sa révérence.

One thought on “GENEVIÈVE DE FONTENAY

  1. S’il suffisait de s’affubler d’un chapeau xxl et d’un tailleur faussement Chanel commandé à la Redoute pour être, comme je l’ai lu partout, la reine de l’élégance, ça se saurait, elle était pour moi la reine de la vulgarité, sa gouaille des faubourgs, ses prises de position très discutables que tu as relatées me suffisent à ne pas regretter le personnage public qu’elle avait, je le reconnais, très habilement construit, son capital sympathie réel n’est pas remis en question, seules sa vision datée de la miss et son idée de la France me laissent sans regrets pour le reste que dire…? Chapeau madame…!

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