STING 68 ANS

JE  TE  VOIS  !


Sting, de son vrai nom Gordon Matthew Thomas Sumner, né le 2 octobre 1951 à Wallsend, dans le nord de l’Angleterre, vient de souffler ses 68 bougies. Ça ne nous rajeunit pas, lui comme nous. On se souvient tous du groupe Police, qu’il forma dès 1977 en compagnie de Stewart Copeland à la batterie et Andy Summers à la guitare électrique. Fin 1979, deux titres emblématiques, “Message in a Bottle” et “Walking on the Moon”, imposèrent le trio sur la scène internationale et le projetèrent vers un succès fulgurant. Beaucoup ignorent que cela faillit ne jamais arriver.

Deux ans plus tôt, en octobre 1977, Sting avait déjà écrit “Roxanne”, futur tube planétaire, mais la chanson était presque passée inaperçue parmi le répertoire punk rock du groupe qui peinait alors à trouver un producteur. Comble de malchance, lorsqu’elle commença à frémir sur les ondes grâce à quelques DJ inspirés, la BBC la censura parce qu’elle traitait de prostitution et d’une belle de nuit ensorcelante ! Sting avait composé ce morceau à Paris, dans la chambre d’un hôtel miteux (proche de la gare Saint-Lazare), inspiré par les tapineuses qui œuvraient en contre-bas et faisaient des allées et venues entre rues sordides et piaules minables. Mi-1978, “Can’t Stand Losing You”, autre future pépite de renommée mondiale, connut le même sort au motif que le titre évoquait le suicide, thème également tabou à l’époque. Plutôt mal barré pour la bande. Alors, que fit la Police ? Une évasion spectaculaire vers les USA, sous la forme d’une tournée de la dernière chance qui permit enfin la libération définitive du message hors de la bouteille. Les stars étaient lancées sans même marcher sur la lune.

Toutefois, s’il ne fallait retenir qu’un titre de Police, je choisirais à coup sûr “Every Breath You Take”, sorti en 1983 sur l’album “Synchronicity”. Dès les premières écoutes, cette chanson me captiva d’une façon troublante. Ce trouble, je ne le compris que bien plus tard, en assimilant une double lecture (on devrait plutôt dire un double entendement) a posteriori évidente. Comme beaucoup, j’avais d’abord songé à une fascination amoureuse. Les paroles, dont la traduction est fournie ci-dessous, semblaient évoquer un attachement profond. « Chaque geste que tu feras, chaque respiration que tu prendras, chaque mot que tu prononceras, etc… je serai là à te regarder… » Pour moi, regarder était synonyme d’admirer, contempler, aduler. C’était la plainte d’un amoureux transi, d’un amant conquis. La réalité était tout autre. Lorsque Sting écrivit ces maux de cœur, il était en pleine dérive sentimentale à cause de l’effondrement de son union avec Frances Tomelty (mariés en 1976, ils divorcèrent en 1984). En vérité, cette chanson est un cri rentré de rage et de jalousie. C’est la tentative froide et effrayante de reprendre le contrôle sur un amour perdu. Une vengeance à la Big Brother de l’âme et du cœur. Une sombre machination d’un être tourmenté et rancunier. « Chaque décision que tu prendras, chaque respiration, chaque sourire, etc… je serai là à te regarder, le jour et la nuit… » prêt à t’exécuter. Et pas seulement du regard. On comprend mieux le visage fermé de Sting et la symbolique du noir et blanc lors du tournage du clip officiel. Pourtant, encore aujourd’hui, bien des gens occultent cette coloration négative pour la travestir en émotion positive. L’auteur en demeure le premier étonné, tout en avouant qu’au moment de sa création, lui-même n’avait pas réalisé à quel point ce texte était sinistre. Un jour, un couple lui a confié que c’était leur chanson fétiche et qu’ils l’avaient fait jouer à leur mariage. « Et bien, bonne chance ! » a-t-il pensé…

Every Breath You Take
(Chaque Respiration Que Tu Prends)

Every breath you take
Chaque respiration que tu prends
And every move you make
Et chaque mouvement que tu fais
Every bond you break
Chaque lien que tu brises
Every step you take
Chaque décision que tu prends
I’ll be watching you
Je te regarderai

Every single day
Chaque jour unique
And every word you say
Et chaque mot que tu prononces
Every game you play
Chaque jeu que tu joues
Every night you stay
Chaque nuit que tu restes
I’ll be watching you
Je te regarderai

(Refrain)

Oh, can’t you see
Oh, ne vois-tu pas
You belong to me?
Que tu m’appartiens?
How my poor heart aches
Comme mon pauvre coeur a mal
With every step you take
Pour chaque décision que tu prends
Every move you make
Chaque mouvement que tu fais
Every vow you break
Chaque serment que tu brises
Every smile you fake
Chaque sourire que tu fausses
Every claim you stake
Chaque revendication que tu renforces
I’ll be watching you
Je te regarderai

Since you’ve gone
Depuis que tu es partie
I’ve been lost without a trace
Je suis perdu sans une trace
I dream at night
Je rêve la nuit venue
I can only see your face
Je peux seulement voir ton visage
I look around
Je regarde autour de moi
But it’s you I can’t replace
Mais c’est toi que je ne peux pas remplacer
I feel so cold
J’ai si froid
And I long for your embrace
Et j’attends ton étreinte
I keep crying baby, baby please
Je continue à pleurer bébé, bébé s’il te plaît

(Refrain)

Every move you make
Chaque mouvement que tu fais
Every step you take
Chaque décision que tu prends
I’ll be watching you
Je te regarderai
I’ll be watching you
Je te regarderai

En bonus, la composition intitulée “Too Many Teardrops”, de Nick Lowe, sortie en février 1982 sur l’album “Nick the Knife”. Le sens et le contexte de la chanson sont différents de “Every Breath You Take”, sortie en mai 1983, mais la ligne de basse est, à l’évidence, de la même inspiration.

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